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Lubies - Page 166

  • Un détour a du s'amorcer par ici...

     Avant de mener cette vie

    de solitaire grandiose,

    j'ai longtemps envié le courage

    de la goutte d'eau qui ose

    tomber en plein désert

    dans un grand bruit blanc,

    en renonçant de ce fait

    à ses petites chimies ordinaires

    sous le fracas du soleil...

    Je suppose que la pluie

    n'aime pas trop se mouiller,

    c'est pour ça qu'elle tombe vite...

    Avant de commencer à vivre

    cette existence qui consiste

    à renoncer au massacre,

    je suis descendue au ruisseau...

    dans la petite ville où nous vivions,

    les chats mouraient à un rythme

    inquiétant.

    Chacun se surveillait du coin de l'œil... 

    Ce ruisseau était l'endroit idéal

    pour faire couler le premier sang.

    On y repêchait souvent cette histoire: 

    une femme avait l'impression

    d'être amoureuse

    d'un homme qui lui crachait au visage...

    Je suppose qu'un détour

    a du s'amorcer par ici...

     

  • Je ferme les yeux quand je rentre...

    Je ferme les yeux quand je rentre

    et c'est comme si

    un coup de baguette magique

    avait endormi toute chose...

    si je m'aventure de nuit

    dans les forêts profondes

    où des sons familiers viennent à vous

    en morceaux,

    le ciel est là,

    l'ennui continue

    de refluer vers le fleuve,

    mais tout se tient maintenant

    dans cet écart ténu

    entre la veille et le sommeil....

    et c'est étrange mais je sais

    que nous nous reverrons

    dans vingt-cinq ans...

    puisqu'il suffit de fermer les yeux,

    seulement quelques heures,

    pour suspendre un peu 

    de cette existence sans génie, 

    et parvenir à s'exposer enfin

    à la mort...

    et alors nos bouches vont et viennent,

    se cherchent avec la même

    promesse d'embrasement

    dans le halo gothique du peintre,

    un gouffre au-dessus duquel on se penche

    sans jamais voir le fond

    et d'où remontent 

    les larmes et les souvenirs...

     

  • L'eau des fleurs...

    Peu importe où et quand,

    quelque part, une fille dira:

    "le chat a du s'enfuir là où les sentiments persistent..."

    Et elle a tellement soif,

    cette fille, 

    qu'elle pourrait boire l'eau des fleurs.

    Un peu plus loin, au milieu des draps, 

    taciturnes et coriaces,

    conformément à l'idée qu'on se fait 

    d'un dimanche matin où les croissants 

    faussent déjà l'opinion,

    bien sur,

    tu te sentiras obligé de répondre:

    "Comme c'était laid, hier soir, cette métaphore,

    quand elle tentait de se frayer un chemin

    dans la foule des noceurs..."