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  • Une mélancolie d'avance...

    Aimer, me dit-elle,

    la vie, les autres,

    mon job et ton corps...

    L'avenir de l'espèce

    humaine

    passera par la flottaison,

    crois-tu?

    Quand je repense 

    à tout ça en même temps,

    oui, et pour de bon,

    j'ai les mains qui tremblent...

    Je me souviens...

    Il y a fort-fort longtemps,

    alors, il y avait un vieux beau...

    L'alcool et la nostalgie 

    étaient les grands passe-temps

    de sa vie...

    Une vie dévastée à force

    d'être

    en avance d'une mélancolie.

    Les vieux-beaux et les possibilités

    entrevues par leurs désirs,

    tu sais, en ce temps-là,

    avaient toujours deux métros

    de retard

    et une mélancolie d'avance...

    Une vie dont l'essentiel

    s'était jusqu'ici

    déroulée

    dans les années quatre-vingt.

    Et ça, chaton,

    je ne le souhaite à personne...

    Il y avait, aussi et surtout,

    cette fille:

    un ancien top-model et un fantôme

    à la chevelure blond polaire...

    Elle habitait à demeure

    les chiottes d'un club célèbre,

    à l'époque...

    Mais revenons au vieux beau

    et à sa logique de survie 

    sur le point

    d'aboutir à une catastrophe. 

    Tout ça qui consistait

    à raconter son histoire

    avec les mots des autres...

    Les années quatre-vingt,

    chaton,

    je ne les souhaite à personne...

    Le sexe, alors,

    mieux avec ou sans amour?

    Tout reste affaire de perception,

    tu ne crois pas?

    La fin du monde reste

    une perception

    occidentale...

    Il y avait donc cette fille:

    un fantôme et un ancien top-model,

    qui vivait recluse

    dans les chiottes de ce club

    très célèbre à l'époque. 

    Elle et sa maigreur.

    Elle et ses romances

    avec cocaïne. 

    Et ça faisait beaucoup

    de monde...

     

     

     

  • Les urgences de l'hiver...

    La pluie ne sera plus

    jamais seule.

    Tu m'expliques-

    toujours tes explications

    pour tout-

    que la nuit sera 

    longue. 

    Notre amitié est vaste.

    Aussi vaste qu'une aire

    d'autoroute,

    juste avant un départ

    pour le bord de mer...

    Tu piques une dernière

    cigarette

    dans le paquet d'un vieux

    complice

    que la mélancolie

    préoccupe. 

    "Regarde...même l'argent

    se laisse pousser 

    la barbe."

    Tu dis ça l'air de quelqu'un

    qui en a un peu assez,

    à force, 

    d'être toujours gentil

    avec la mauvaise

    personne. 

    Il y a deux sortes de mélancolie.

    Très différentes par le ton

    et la technique.

    Et nos soifs de bêtes molles

    peinent à faire

    mousser le vieil onirisme 

    de dauphin-

    sais-tu que c'est onirique,

    les dauphins?-,

    quand la crise de la quarantaine

    s'intensifie

    dans les urgences de l'hiver... 

     

  • ...

    Comme un vieux mondain

    au visage froissé,

    je décline surement

    à mesure que le jour

    grandit...

    Le temps passe

    de plus en plus vite.

    Je m'endors dans mes

    costumes

    comme on met la viande

    à rassir.

    Oh bien sur, je continue

    à faire ce que crois utile

    et nécessaire de faire

    pour lutter à balles réelles

    contre cette idée de décomposition

    et de pourriture

    laquelle, depuis toujours,

    mène grand train.

    J'épanche dans la nuit

    les sentiments

    que je ne peux épancher-

    que je n'ai jamais pu épancher-

    dans la vie de tous 

    les jours.

    La vie de tous les jours

    ne sera jamais à mes

    yeux

    qu'un immense zoo factice,

    où tout naît, tout s'agite

    et tout meurt

    sans grand moment

    d'angoisse...

    Et alors, chaque matin,

    depuis

    que j'ai commencé

    à vieillir 

    et c'est venu d'un coup-

    une évidence, ils disent-,

    dans les yeux

    de cette fille égarée,

    comme tant d'autres avant elle-

    comme moi, comme vous, 

    mes sœurs et mes frères 

    inconsolables de la nuit-

    dans la vacance et la cohue,

    cette fille aux narines

    frémissantes

    à qui j'ai voulu expliquer,

    un soir,

    l'histoire du chien rouge

    et de la balançoire,

    oui, chaque matin, alors,

    j'ai beau exposer

    l'emploi du temps des nuits

    à venir,

    c'est comme de vivre

    depuis des années

    dans une ville où plus rien

    n'aurait de significations.

    Comme si j'avais cessé de trouver

    amusant

    la grande enquête 

    sur le cadavre du monde

    et ses usages,

    qu'ils semblent, toutes et tous,

    bien décidés à poursuivre

    jusqu'au bout...