Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Lubies - Page 17

  • Surendettement

    Plus tard il m'a dit

    On a beau s'émerveiller 

    d'une goutte d'eau

    qui s'étire sur le rebord 

    de nos migraines 

    comme le vent 

    traverse la terre 

     quand même 

    la pluie c'est la pluie 

    Rien ne ressemble plus 

    à l'automne que l'automne 

     

    Plus tard j'ai collé 

    ma fatigue à la rampe 

    de pole dance 

    du métro ligne 12

    J'ai voulu m'assoupir 

    au milieu de la rumeur

    des conversations 

    puisque nous étions 

    dans cette heure 

    encore joyeuse

    quand les gens se regardent 

    avec des sursauts 

    de tendresse 

     prêts à leur faire 

    fondre la bouche

    et s'ils se mettaient 

    enfin à parler 

    ce serait pour s'occuper 

    de ces petites choses 

    qui comptent autant 

    que les morceaux de pommes

    minuscules 

    perdus comme des éclats 

    d'un réel caramélisé 

    au milieu du gigantesque 

    appareil à crumble 

    de la vie quotidienne 

     

    Plus tard je n'ai rien pu faire 

    contre la voix 

    de cette femme 

    qui parlait toute seule 

    dans les lunettes 

    de son voisin de strapontin 

    C'était après un souvenir 

    d'enfance qu'elle hurlait 

    Petite on avait une ferme

    répétait-elle 

    Vous comprendrez mieux 

    quand vous serez vieille 

    monsieur vous verrez 

    Petite j'adorais jouer 

    avec des allumettes 

    Mon père ça le rendait fou

    quand je craquais 

    mes allumettes 

    là où on faisait sécher 

    le tabac 

    Vous comprendrez mieux 

    quand vous serez incapable 

    de calculer 

    votre reste à vivre 

     

    Plus tard je me suis demandé 

    quand cette époque 

    qui ne reculait devant 

    aucune bassesse 

    allait se mettre 

    à pointer du doigt 

    le surendettement

    de nos souvenirs

  • Automne

    La première fois que j'ai embrassé 

    une fille c'était un soir 

    de fête foraine 

    C'était à l'abri d'une roulotte 

    Ma langue s'est mise à tourner 

    dans sa bouche 

    comme une auto-tamponeuse 

    qui rêve des 500 miles

    d'Indianapolis 

    Au bout de quelques secondes 

    elle s'est dégagée 

    A posé ses mains 

    sur mes épaules 

    M'a dit : tu embrasses 

    comme un hélicoptère 

    Attends je vais te montrer 

    Un baiser c'est comme 

    une danse 

    Ta langue suit 

    les pas de ma langue 

    et voilà 

    La première fois qu'une fille 

    m'a embrassé 

    j'ai appris à me méfier 

    de la première personne 

    du singulier 

    Depuis j'ai passé ma vie 

    à faire l'éloge de la lenteur 

    Ce matin ce genre de principe 

    ne me sera d'aucune utilité 

    Au sol de la salle de bain 

    gît l'étendoir à linge

    Une corde a cédé 

    quelque part au plafond 

    comme l'été 

    sous le poids humide 

    de l'automne...

     

  • Chemsex

    La nuit vient d'ôter son masque 

    et dans le train 

    à quelques mouvements de doigts 

    aussi suspects 

    qu'un témoin assisté 

    dans une affaire de catéchisme 

     et de chemsex 

    j'ai compris que ce matin 

    avait renoué avec ses angoisses 

    qui renaissent toujours 

    dans les yeux jaunes 

    de l'automne 

    Les pluies chasseront

    les pluies

    Bientôt on recommence

    à s'inquiéter 

    pour ce qui n'existe

    pas encore