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Lubies - Page 21

  • Pouce

    Un jour alors

    c'est l'aurore

    on délaisse les plages 

    à leurs lionnes des sables

    L'histoire manque toujours

    un peu de muscles

    au moment de rendre

    hommage 

    à nos vieux amis

    imaginaires
     

    On revient voir du côté
    de ce monde rapide

    qui bleuit à la mort

    du plus insignifiant

    des lanceurs de couteau

    On s'asperge la bouche

    le visage 

    pour oublier qu'on voudrait

    être des oiseaux

    Et des plumes à la place 

    de nos cils 

    Bientôt des langues

    de chat 

    viendront laper 

    le peu d'insinuations

    que les regards chuchotent

    au matin reparti

    sur une piqure de mouche

     

    Un jour quand même

    le soleil est là

    jusque dans le saccage

    des feuilles

    Impossible

    de résister au spectacle

    absurde et brillant

    d'une ville qui suce

    son pouce

  • Habitudes

    Je me lève avec le sommeil 

    les doigts cherchent

    à retenir cette envie 

    d'allonger mes jambes 

    sur une plage mais

    une qui n'aurait de sa vie 

    jamais fréquenté de serviette 

    Une poignée de secondes 

    à regretter à la sauvette 

    paupières encore tombantes 

    l'absence récente du chat

    et de ses douces

    nuisances matinales

    le long de mes cuisses 

    ses morsures d'enfant 

    en quête d'attention 

    depuis que la fraîcheur 

     sur le jardin m'oblige 

    à fermer la fenêtre 

    Je repousse la couette 

    au pied d'une paire 

    de baskets 

    Et ce léger mouvement 

    de l'air remue 

    le troupeau de poussières 

    qui rumine sous le lit

    Fatigue déjà l'esprit 

    d'une chaussette orpheline 

    plus revue plus cherchée 

    depuis au moins 

    trois machines 

    Je me lève avec 

    des envies de plage 

    vierge de bêtise humaine

    De chat perdu 

    à la recherche d'un vote

    de confiance qui n'excèderait 

    pas la durée moyenne 

    d'un rapport sexuel 

    de septuagénaire 

    Mais le doigt de quelqu'un

    la main de quelque chose 

    m'indique la direction 

    à prendre 

    Celle qui mène toujours 

    à la machine à café 

    puis au paquet de cigarettes 

    qu'un remords hygiéniste 

    violent et temporaire 

    aura encore balancé 

    à la poubelle 

    Je me lève du pied

    gauche

    Celui

    qui sait

    pouvoir compter 

    sur ses vieilles habitudes 

  • Filer droit

    C'est toujours le lundi

    que ça se passe

    et je marche

    en laissant dans mon dos

    les hauteurs de craie

    de la butte Montmartre

    N'empêche

    Il suffit que je me retourne

    comme un enfant

    qui déjà regrette

    sa pulsion de fugue

    que je me retourne à peine

    quelques secondes sur

    les premiers contreforts

    de cette colline urbaine

    de pacotille

    pour qu'enfin la plaine

    peu à peu m'apparaisse

    et bientôt son atmosphère

    ses parfums sa lumière

    son clair-obscur

    ses ombres

    C'est toujours le lundi

    que m'apparaissent

    ces enfants et ces femmes

    des visages de suie et de sueurs

    des mains et des bras

    qui fouillent les poubelles

    triturent dans le passé

    honteux de la ville

    avec des façons d'automate

    C'est toujours sous les regards

    torves indfférents

    de la foule

    venue s'assommer

    une dernière fois

    sous le soleil des terrasses

    les doigts repoussant

    les fantômes de l'été

    à la lisière

    de leurs empreintes

    digitales

    C'est toujours début septembre

    Le passé est encore

    un endroit dangereux

    Avant que l'automne

    recommence à filer droit

    il faudrait qu'il pense

    à ne rien oublier derrière