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    Trois pies un peu mal en point

    se battent depuis dix minutes 

    pour les restes d'un produit

    de grande consommation

    retiré de la vente

    après le scandale

    de la bague magique

    retrouvé au doigt

    d'un marin qui manqua

    perdre un œil

    cette fois que la brume

    chassant en meute

    à la crête des vagues

    alors que le printemps

    sans plus attendre

    s'en retournait en plein hiver

    puisque le mythe

    était sur le point de rendre

    son dernier souffle 

    et c'était carrément

    de notre faute

    nous écrivions à propos

    d'un drame qui n'existait pas

    en regardant droit

    dans les yeux

    là où tout se cache

    et s'enfouit

    cette fille en débardeur

    mauve

    qui rêvait de tatouer 

    sa liste de courses

    sur le bras

    de son amant imaginaire...

     

     

    (Photo Frédérick Jeantet)

     

     

     

  • Cette chose blanche qu'on nomme le matin...

    Ici commence une histoire

    et c'est peut-être l'histoire

    de cette chose blanche

    qu'on nomme le matin...

    Celle ou celui qui a inventé-

    "inventé", c'est encore mal dire.

    Je sais, je sais. Reprenons-,

    celle ou celui

    à l'origine de cette histoire 

    minuscule, 

    a eu vite fait 

    d'ouvrir la main-

    oh si seulement

    vous l'aviez-vu faire.

    Si seulement...-

    oui, vite fait d'ouvrir la main

    pour que toute cette histoire, 

    une histoire périssable

    une histoire à consommer sur place, 

    une histoire animée d'aucun dessein,

    non que dalle, même pas ça,

    absolument rien pour la faire

    tenir tant soit peu

    en l'air, 

    le genre d'histoire 

    qui aurait mieux fait

    de rester enfermée

    à double tour dans sa maison, 

    oui, 

    celle ou celui qui a cru malin

    d'inventer cette histoire

    aurait pu, au moins,

    se sauver très loin d'ici avec.

    Ou alors nous trancher

    les oreilles

    juste avant que.

    Ou bien, je ne sais pas, 

    moi...

    Ici finit cette histoire 

    puisque son auteur,

    selon toute vraisemblance,

    n'a pas voulu l'allonger

    démesurément...

     

    (Photo Frédérick Jeantet)

     

     

     

  • Quels gestes lents et minutieux...

    Il y a eu cette fois,

    quand mes dernières illusions

    vivaient en haut style,

    accrochées à la paroi

    toute moite

    des lendemains

    de fête...

    Et alors le monde,

    autour de moi, 

    se laissait vivre,

    bercé par la petite morale

    d'une poignée 

    de plans séquence,

    à peine de quoi

    bricoler

    un bien mauvais film,

    avec tous ces hommes

    vaguement comiques

    qui chantent leur pauvre

    chanson d'amour

    avec une voix de canard...

    Il y a eu cette fois,

    quand je vivais dans l'opulence  

    sans que je sache 

    vraiment

    d'où m'était venue

    une telle richesse...

    On avait beau me répéter

    que ce matin 

    venait de recourir

    à la chirurgie esthétique,

    après ça,

    où trouverait-on des silences

    plus expressifs que des paroles?

    Quels gestes,

    lents et minutieux,

    et ce début

    né pour mourir 

    un dimanche matin,

    capable d'accoucher

    d'une histoire où,

    trois coups de foudre

    et deux vengeances

    habiles et malicieuses

    plus loin,

    tout finirait pourtant

    par s'arranger

    à l'entière satisfaction

    du lecteur et des personnages...

     

     

    (Photo Frédérick Jeantet)