...
Revu, me dit-elle,
la carcasse
de ce Vespa vert pomme,
sa rouille sans personne,
dans cette vitrine abandonnée
devant laquelle
les gens
vont et viennent sans arrêt...
Ensuite, je me suis souvenue
de cet homme
quand, par ici,
c'était encore vivant
et les choses
un peu plus frénétiques.
Cet homme...
Il parlait
me dit-elle.
Oui, il parlait
tout le temps.
Thèses et antithéses
sans cesse
se dressaient sous nos yeux.
Entre nous, on avait coutume
de dire que nos cœurs
souhaitaient ses mots,
parfois catégoriques,
souvent contradictoires,
oui que nos coeurs
les souhaitaient
avec une sainte impatience...
Il parlait, me dit-elle.
Oui il répétait,
souvent,
ceci:
"quand on est déconcerté
par la réalité
de ce monde,
il est quelquefois rassurant
d'envisager
d'autres possibilités....
Une phrase, une formule
qu'on pique à quelqu'un
d'autre,
et c'est encore mieux
l'après-midi,
avec l'espoir
qu'il existe un monde
meilleur.
Une meilleure version
de nous-mêmes...
Il parlait, me dit-elle.
Oui, il parlait.
"Chacun peut dévier sa course.
Rien n'est immuable.
On peut gagner du temps.
Il faut trouver un moyen.
Sans mesurer toutes
les conséquences?
On peut.
Au risque
de provoquer une tragédie?
Il faut..."
La vie est un puzzle,
me dit-elle,
et on doit bien,
de temps à autres,
pouvoir recoller les morceaux.
Non?