Audrey Horne...
Dans la vie réelle, l'algèbre n'existe pas...
Tu lèves les yeux au ciel
et moi je marche dans les nuages.
Ensuite nous nous installons
bien confortablement
au début des années
quatre-vingt dix,
et même si tout cela semble,
dès le départ,
voué au renoncement
et aux déceptions,
quand même,
on a tous un peu hâte
d'assister à nos débuts dans la vie,
quand même...
Tu me souris alors que tu tends
le bras
dans un froissement délicat,
élégant, oui, très élégant,
un froissement de tissus
synthétique;
ce geste-là
comme un mot où j'entends
encore, la sécheresse
et la grâce.
Je me souviens de la première image
au moment où,
dans une odeur de neige,
le poste de télé s'allume....
Tu me sauves la vie et puis tu me brises le cœur...
Nous tombons au beau milieu
d'un épisode de Twin Peaks.
David Lynch est déjà David Lynch,
depuis longtemps,
les américains viennent tout juste
de remporter
la dernière manche de la guerre froide
au meilleur des cinq sets,
le monde est du côté
de celui qui reste debout,
voilà pour l'idéologie dominante,
mais peu importe,
puisque nos rêves ne se sont pas encore
brouillés
avec leur système nerveux central.
A l'écran, cette fille,
Audrey Horne,
surgit et c'est là,
au tout début des années
quatre-vingt-dix,
cette décennie peuplée
de comédiennes perdues à tout jamais
pour avoir cru, et dur comme fer,
que la vie naîtrait toujours
dans les particules de plastique
qui ont depuis lors renoncé
à leur manière de vivre
sur les plateaux de cinéma;
mais oui, il y a cette fille,
Audrey Horne,
et mon dieu qu'elle est belle
comme ça,
à mi chemin entre la princesse moderne
et l'éternelle chipie de poche,
et puis elle, au moins,
dans la vie,
pour commencer,
elle a tout ce qu'elle veut...