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    C'est toujours pareil. L'histoire démarre péniblement, comme si le monde portait un sac de briques sur son petit dos plus tellement préoccupé d'emporter l'adhésion. On a toujours du mal à s'habituer aux contours de la nuit précédente sans ta chanson où les rêves vous redonnaient enfin la parole. Ça peut avoir l'air d'une blague mais la dernière fois que je t'ai dit " je t'aime", alors, c'était quand? C'est toujours pareil. Et puis le train reprend la trame du grand récit, caméra à l'épaule. Après quelques réticences, il redevient cet observateur avisé des sciences naturelles. Quelque part entre nos deux oreilles, une chanteur chante et sous le regard, bientôt le film ne tarde pas à s'enrichir d'une poussière d’événements. Moteur! Moteur demandé...
    Piscine municipale. Centre sportif des Rasdiguelles. Ville de Suresnes. C'est quelque part au milieu d'une après-midi prise de bâillement, me dit-il. C'est toujours pareil. Au-dessus, un ciel d'azur s'étale de tout son long. Le genre de ciel pas malheureux d'avoir réussi à mettre plusieurs continents d'écart entre lui et son ombre. A main droite, Paris, plutôt fière d'exhiber ses buttes têtues, celles-ci toujours si promptes à vous rejouer le son et lumière de leurs révoltes passées. A main gauche, La Défense, passive comme un jour chômé. Et puis voici qu'on s'enterre. Et puis voici comme on plonge. Pont de Neuilly. Sablons. Porte Maillot...
    C'est toujours pareil. Une voix glaciale d'héroïne de SF anticipe les paliers de décompression. Le métro sans wagon s'enroule autour de nos souvenirs comme un boa hi-tech. Le métro, hi-tech ou pas, nous cause cet éternel vertige. Cette chute sur la tempe à travers le temps. Et puis, Concorde, "attention à la marche en descendant du train..." C'est toujours pareil. Rien de cette fièvre, rien de ce désespoir maladroit ne recourt à l'astuce d'un lac ou d'un bois pour voyeurs romantiques. Et la vie n'est plus tellement sûre, plus tellement digne d'être admirée. Sans rire, la dernière fois que je t'ai dit " je t'aime", alors c'était quand?

     

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    La ville, hier soir, me dit-elle, et il faisait si doux. La nuit et ses allures de petite bourgeoisie progressiste. La nuit et ses lacunes didactiques. La ville qui, toujours au moment où on s'y attend le moins, se met à sucer le sang de tous ses habitants. Et dans le creux de l'oreille, elle déverse sa voix chaude. Leur répète: je t'aime. Je t'aime. Je t'aime...

    L'autre rive du fleuve? Pas si longtemps, les vieux parisiens l'appelaient encore: la province de Paris. Et il n'y avait dans cette expression aucune once de mépris. Bien au contraire. Paris n'existerait pas si la Province ne s'était pas chargée d'y introduire, siècle après siècle, son cortège de masques...
     
    Ce jour, vers 16h, comme je m'approchais de l'oisellerie du Pont Neuf, j'ai eu envie d'une limonade. Mais oui. De plaquer mes lèvres sur un verre de limonade. D'entendre les mots polis de chaque bulle, comme ça, à même le verre. Mais il faisait un peu trop chaud pour la saison. Ma silhouette se déplaçait comme une ombre fausse. Mes yeux étaient tiraillés par des sentiments complexes...
     
    Ce jour, vers 16h, c'était ce moment où, dans nos têtes, toutes les fournaises s'allument...
     
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    Regardez un peu

    comme ce matin

    est encore à traîner

    en slip dans le salon.

    Il a l'air mollasse

    de ces matins

    qui n'ont même plus

    la force de s'inventer

    des petits plaisirs solitaires,

    genre prendre un café

    en songeant à cette fille

    qui peignait

    des natures mortes

    avec ses seins.

    Regardez un peu

    comme il fait fin de race...